Dre Gilla Shapiro
Dre Gilla Shapiro, Psychologie de la santé et médecine du comportement
La psychologie de la santé et la médecine comportementale couvrent beaucoup de domaines, qu’il s’agisse d’encourager les personnes atteintes de diabète à prendre leur insuline ou d’inciter les gens à adopter des habitudes alimentaires plus saines. Le Mois de la psychologie met en vedette aujourd’hui la Dre Gilla Shapiro, qui parle du travail qu’elle fait dans le domaine du cancer et de la vaccination.
Psychologie de la santé et médecine du comportement
« Nous savons que le taux de vaccination varie selon le vaccin. Même avant la COVID-19, certains vaccins, comme le vaccin ROR (vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole), étaient beaucoup plus administrés que le vaccin contre la grippe. Il existe également des différences entre les vaccins destinés aux enfants et aux adolescents. C’est le cas du vaccin contre le VPH [papillome humain], qui est administré dans les écoles aux adolescents. »
Les psychologues de la santé et les scientifiques du comportement possèdent une expertise qui s’étend à une grande variété de spécialités et de disciplines. Plusieurs d’entre eux sont également des psychologues cliniciens agréés, autorisés à fournir des services et des traitements psychologiques. Les cliniciens spécialisés en psychologie de la santé aident les gens à surmonter leurs problèmes médicaux, leurs maladies et leurs maladies chroniques. Les spécialistes du comportement étudient tout cela, surtout lorsqu’il s’agit de comportements de prévention et de comportements qui peuvent avoir une incidence sur l’évolution d’un diagnostic médical. Qu’est-ce qui aide une personne atteinte d’une maladie cardiaque à suivre un régime alimentaire strict? Qu’est-ce qui influence la constance avec laquelle un diabétique administre son insuline? Et – point très important ces derniers temps – quels facteurs influencent le consentement et la volonté d’une personne à se faire vacciner?
Imaginez que vous venez tout juste de recevoir un diagnostic de cancer. Des centaines de questions surgissent probablement dans votre esprit et encore plus de craintes vous assaillent soudainement. D’autres facteurs peuvent aussi ajouter à ce stress, comme la possibilité de devenir infertile, la perte de revenu possible ou la nécessité de faire garder les enfants pendant le traitement. Il se peut également que vous soyez désormais entouré de toute une série de nouveaux médecins et spécialistes que vous n’aviez jamais rencontrés auparavant – oncologues, infirmières en oncologie, intervenants-pivots, consultants en génétique. Cela fait beaucoup de choses à gérer, outre le fait d’avoir à accepter le diagnostic lui-même.
L’une des personnes qui pourrait vous aider à traverser cette période difficile est un psychologue, comme la Dre Gilla Shapiro, au Princess Margaret Cancer Centre de Toronto. La Dre Shapiro est une psychologue clinicienne spécialisée en psychologie de la santé et une psycho-oncologue (une spécialiste du cancer). Elle travaille avec des personnes qui ont reçu un diagnostic de cancer, avec celles qui suivent un traitement et avec les personnes qui reçoivent des soins de fin de vie.
« De nombreuses personnes éprouvent une détresse élevée [liée au cancer et à son traitement]. Il est donc très important de disposer d’une équipe de traitement spécialisée pour les soutenir, ainsi que leurs proches. »
Une partie de l’aide offerte prend la forme de thérapies de soutien, et une autre partie est liée à la prise de décision. Si une personne atteinte d’un cancer doit prendre la décision de commencer ou non un traitement de chimiothérapie, compte tenu des effets dévastateurs de ce traitement sur l’organisme et du pourcentage de chances qu’il a de fonctionner, le fait d’en parler peut beaucoup aider. La décision de participer ou non à un essai clinique peut être un choix très difficile à faire pour une personne atteinte d’un cancer. Un psychologue, comme la Dre Shapiro, appréhende cela de plusieurs façons :
« Les gens ont besoin de soutien de différentes manières et ont des inquiétudes différentes, qui peuvent être d’ordre social, pratique, psychologique ou émotionnel. Certains se demanderont comment aborder le cancer avec leurs enfants. D’autres auront besoin de soutien pour traiter leurs symptômes comme la douleur, l’insomnie, l’anxiété ou la dépression. Certains types de cancer sont associés à une prédisposition génétique. Ainsi, si un test génétique est effectué, certaines personnes se demanderont à qui elles devraient le dire, et comment le dire. »
Au Princess Margaret Centre, une équipe travaille à l’élaboration d’interventions fondées sur des données probantes pour réduire la détresse et améliorer les conditions de vie des patients atteints de cancer. Par exemple, une intervention appelée « thérapie CALM » (Managing Cancer And Living Meaningfully) est conçue pour aider les patients à s’adapter à la vie à un stade avancé du cancer. Elle s’inspire de théories en psychologie et en santé mentale – théorie relationnelle, théorie de l’attachement et théorie existentielle – l’objectif étant d’aborder une gamme de problèmes de manière individualisée. La prise en charge des symptômes, les changements dans la relation du patient avec lui-même et avec ses proches, le sens de la vie et la finalité de l’existence, les espoirs et les préoccupations relatifs à l’avenir sont autant de facteurs pris en compte dans la thérapie CALM et sont tous vécus différemment par chaque personne qui reçoit un diagnostic de cancer en phase terminale.
Si la Dre Shapiro a décidé de travailler au Princess Margaret Cancer Centre, c’est en partie parce son superviseur, le Dr Gary Rodin, et Sarah Hales, une collège de ce dernier, est la personne qui a élaboré la thérapie CALM. Le Dr Rodin et sa collègue, la Dre Madeline Li, ont également fait des travaux intéressants pour comprendre les facteurs qui influencent les individus lorsqu’ils ont à prendre des décisions difficiles en lien avec leur santé. L’aide médicale à mourir, ou AMM, apparue très récemment, est une décision importante dans le domaine de la cancérologie. La Dre Shapiro voulait apporter à ce travail la dimension de l’équité en santé et l’optique des politiques en matière de santé. Mais ce n’est pas là que la Dre Shapiro a commencé ses travaux en psycho-oncologie et en sciences du comportement; elle a commencé à travailler en psycho-oncologie dans le domaine de la prévention du cancer et de la vaccination. Elle s’intéressait notamment aux vaccins, comme le vaccin contre le VPH, et à la façon de prévenir les virus qui causent le cancer du col de l’utérus et d’autres cancers en aidant les personnes à faire des choix comportementaux, comme se faire vacciner.
Moins de deux ans avant que la COVID-19 ne soit qualifiée de pandémie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la Dre Shapiro a fait son doctorat sur l’hésitation à l’égard du vaccin contre le virus du papillome humain (VPH) chez les parents canadiens. Avec ses collègues de l’Université McGill, elle a mis au point des échelles pour mesurer les attitudes à l’égard des vaccins et a mené des recherches pour comprendre les facteurs comportementaux et sociaux de la vaccination dans la population canadienne.
En 2019, elle a commencé à travailler avec l’OMS à l’élaboration d’outils de vaccination infantile systématique et à mesurer les facteurs comportementaux et sociaux de la vaccination à l’échelle mondiale. Lorsque la pandémie a frappé, ce travail a ensuite permis de comprendre l’acceptation des vaccins par les adultes et leur intention de se faire vacciner contre la COVID, lorsque le vaccin serait offert.
Pendant la pandémie de COVID-19, la Dre Shapiro faisait partie du groupe de travail sur les sciences du comportement et la lutte contre la COVID-19 de l’Ontario; de concert avec ses collègues du groupe de travail (dont plusieurs sont également des membres de la Section de psychologie de la santé et de médecine comportementale de la SCP), elle a publié en octobre un document intitulé « Behavioural Science-Informed Strategies for Increasing COVID-19 Vaccine Uptake in Children and Youth » [LIEN].
Tout en étudiant les facteurs comportementaux et sociaux qui ont une incidence sur l’acceptation des vaccins contre la COVID-19, elle a également commencé à s’intéresser à un effet domino de la pandémie, à savoir les vaccinations systématiques manquées ou retardées. La Dre Shapiro et ses collègues de l’OMS et d’autres pays viennent de terminer une étude sur l’omission des vaccins à administrer dans le cadre de la vaccination systématique des enfants dans 26 pays pendant la pandémie [LIEN - COVID-19 and missed or delayed vaccination in 26 middle- and high-income countries: An observational survey].
Imaginez que vous ayez reçu un diagnostic de cancer, que vous ayez été opérée et ayez subi une radiothérapie, et que vous soyez maintenant sortie de tout cela avec un bilan de santé (relativement) positif. Un psychologue clinicien de la santé vous a peut-être aidé tout au long du processus, mais maintenant une autre menace existentielle, hors de votre contrôle, apparaît : une pandémie mondiale. Étant immunodéprimée, votre santé dépend de la vaccination de votre entourage contre le virus. Ce n’est pas une situation facile, mais il est rassurant de savoir que des psychologues de la santé et des scientifiques du comportement comme la Dre Shapiro y sont attentifs.