Série « La psychologie peut vous aider » :  Embaucher les meilleurs candidats à l’aide de l’entrevue de sélection structurée

Lorsque vient le temps d’embaucher un nouvel employé, presque toutes les organisations utilisent, dans le cadre de leur processus de sélection, une forme d’entrevue de sélection. La mesure dans laquelle l’entrevue prédit le rendement au travail dépend de la façon dont celle-ci est conçue et menée.

Entrevue de sélection non structurée typique

L’entrevue de sélection est la méthode de sélection la plus utilisée; il est donc essentiel de la mener correctement pour embaucher la bonne personne. L’entrevue de sélection peut être vue comme une évaluation ou un test, comme tout autre test utilisé dans la sélection du personnel. Mais l’entrevue de sélection est très différente, car, au lieu de répondre à un test en ligne ou un test sur papier, le candidat doit répondre à une série de questions orales. On utilise ensuite les réponses données aux questions d’entrevue pour déterminer si le candidat a les aptitudes requises pour le poste qu’il convoite et est apte à travailler dans l’environnement de travail. Les entrevues peuvent servir à d’autres fins, dont le recrutement actif de personnel.

Toutefois, certains risques sont associés aux entrevues de sélection, et les intervieweurs doivent les connaître s’ils veulent mener des entrevues efficaces et éviter tout problème juridique indu.

La recherche met en lumière certaines difficultés que pose le recours aux entrevues de sélection typiques, à savoir :

  • Possibilité de résultats biaisés au désavantage du postulant, fondés sur des facteurs non pertinents au rendement au travail, comme l’apparence, le sexe, le poids, l’âge ou l’ethnie.
  • Difficulté à distinguer les informations pertinentes à recueillir et à en comprendre la pertinence.
  • Les biais et les heuristiques de jugement (moyens de simplifier une tâche complexe) l’emportent souvent. Ces biais s’installent avant même le début de l’entrevue — par exemple, les intervieweurs se font souvent une idée du candidat en fonction de son curriculum vitæ, ou au moment de rencontrer le candidat, et ont tendance à confirmer leur opinion au cours de l’entrevue.

Plusieurs entrevues d’emploi mal conçues souffrent de différentes lacunes; dans certains cas, les questions varient d’un intervieweur à l’autre ou sont interprétées différemment d’un intervieweur à l’autre. Il arrive également que les questions posées lors de l’entrevue ne soient pas véritablement liées au poste à pourvoir. Ces entrevues sont appelées entrevues non structurées, parce que les questions d’entrevue ne sont pas fondées sur une analyse explicite ou systématique des tâches, les questions sont posées de façon désordonnée, selon l’intervieweur et la personne interviewée, et la notation du candidat interviewé est arbitraire et subjective. En substance, les entrevues non structurées font appel à l’intuition de l’intervieweur vis-à-vis du candidat et l’entrevue se déroule sous forme de conversation — la proverbiale « conversation autour d’un café ». Ces entrevues sont susceptibles d’être biaisées, contaminées par l’erreur et inexactes, et d’avoir peu de liens avec l’efficacité au travail. La recherche a montré que ces types d’entrevues fournissent très peu d’informations utiles pour sélectionner le meilleur candidat pour le poste à pourvoir. Ils offrent aussi une protection juridique limitée pour l’organisation qui procède à l’embauche.

La solution : l’entrevue de sélection structurée

La recherche montre que la capacité de prédiction des entrevues structurées est significativement plus élevée que celle des entrevues non structurées, et que, en fait, les entrevues structurées sont les outils de sélection du personnel les plus prédictifs. On a également constaté que les entrevues structurées réduisent ou éliminent les préjugés dont il a été question précédemment.

Les entrevues structurées ont les quatre caractéristiques suivantes :

  • Questions précises : l’élaboration des questions d’entrevue est orientée par une « analyse du poste » qui repose sur les activités exécutées dans le cadre du travail et le contexte particulier du lieu de travail.
  • Questions uniformes : tous les intervieweurs posent à chaque candidat la même série de questions dans un ordre déterminé, sans demander davantage de détails et en évitant d’utiliser les questions exploratoires standard.
  • Évaluation normalisée : une grille de notation standardisée est utilisée pour mesurer la performance à chaque question de l’entrevue individuelle.
  • Peu de place à l’établissement de rapports personnels entre l’intervieweur et la personne interviewée : une entrevue hautement structurée limite les questions susceptibles d’établir des rapports personnels avec la personne interviewée et limite les conversations informelles. Si malgré tout, l’intervieweur doit établir un rapport personnel, il doit le faire de manière structurée, avec chaque postulant, et éviter de poser des questions qui contreviennent à la législation sur les droits de la personne.

Comment créer une entrevue de sélection structurée?

  • Commencez par des questions fondées sur les exigences essentielles du poste. L’analyse des tâches ou l’utilisation d’un modèle de compétences vous permet de dégager les connaissances, les compétences et les habiletés requises pour le poste à pourvoir. Si possible, identifiez des événements critiques et des exemples de comportements efficaces et moins efficaces des employés lorsqu’ils sont confrontés à ces événements. Une fois que vous savez ce qu’exige le poste, élaborez les questions. Les questions ci-dessous sont efficaces pour évaluer les candidats en fonction des exigences du poste.
  • Dans le cas d’un candidat expérimenté, posez des questions qui portent sur le comportement passé de celui-ci dans certaines situations apparentées (c’est-à-dire des questions comportementales), lesquelles sont généralement des prédicteurs fiables du comportement futur. Par exemple, « Parlez-moi d’une situation où vous étiez en désaccord avec un membre de votre équipe de travail. Comment avez-vous réagi? Quelle a été l’issue de cette situation? »
  • Dans le cas d’un candidat qui n’a pas d’expérience, utilisez des questions hypothétiques ou des mises en situation afin de déterminer comment la personne interviewée réagirait dans une situation particulière, qui comporte un dilemme. Par exemple, « Vous supervisez un groupe de dix employés qui travaillent sur un projet urgent. Deux membres de l’équipe commencent à se disputer à propos d’une erreur de budget, chacun s’accusant d’être à l’origine du problème. Un des employés quitte la pièce rapidement en criant des injures, pendant que le deuxième va vous voir en déclarant qu’il ne peut plus travailler dans cette équipe. Quelle approche utiliseriez-vous dans cette situation? »
  • Une entrevue peut comprendre les deux types de questions qui figurent ci-dessus. Quel que soit le type de questions utilisé, vous devez poser la même série de questions d’entrevue à tous les postulants. On doit en outre fournir un guide d’entrevue qui explique aux intervieweurs l’ordre dans lequel les questions doivent être posées, la grille de notation pour chaque question, qui doit inclure des définitions ou des exemples de réponses et les notes qui leur sont attribuées (p. ex., quelle réponse vaut 4 points sur une échelle de 1 à 5), et ainsi de suite. Le guide d’entrevue devrait aussi renfermer des instructions détaillées et les intervieweurs devraient recevoir une formation, incluant une formation pour savoir comment éviter les erreurs et les biais. La formation des évaluateurs sur le cadre de référence, exposée en détail ailleurs, est probablement l’une des meilleures méthodes. Idéalement, les entrevues devraient être conduites par un groupe d’intervieweurs (chacun ayant des compétences différentes).
  • Les informations obtenues à partir de l’analyse des tâches, du modèle de compétences ou des événements critiques devraient constituer la base de la grille de notation. Par exemple, pour noter une question d’entrevue visant à évaluer des niveaux de compétences particuliers, comme les connaissances mécaniques, on pourrait demander à des experts du métier dans quelle mesure cette compétence est nécessaire pour exécuter efficacement le travail. (Pour avoir des renseignements supplémentaires sur l’analyse des tâches, consultez la bibliographie ci-dessous.)

Où puis-je obtenir plus d’information?

Section de la psychologie industrielle et organisationnelle de la SCP

Dans le vaste domaine de la psychologie, la psychologie industrielle et organisationnelle est une spécialité fondée sur l’étude scientifique du comportement dans les organisations. Les psychologues du travail et des organisations travaillent à améliorer le fonctionnement organisationnel et le bien-être des employés au moyen de systèmes de gestion et de communication, des pratiques d’embauche, de l’évaluation du rendement, du développement du leadership et des programmes de formation.

Ils fournissent également de la consultation professionnelle aux organisations afin d’aider celles-ci à accroître la productivité du travail et la satisfaction des employés. Vous trouverez de l’information supplémentaire sur le site Web de la section : https://cpa.ca/aproposdelascp/sectionsdelascp/industrialorganizationalpsychology/.

Articles publiés dans des revues appliquées

  • Society for Human Resources Management (2006). Using structured interviews to increase hiring investment. Society for Human Resources Management, Inc.

Guides techniques

  • Society for Industrial and Organizational Psychology (2003). Principles for the validation and use of personnel selection procedures (4eédition). SIOP Inc.

Livres

  • Catano, V.M., W.H. Wiesner, R.D. Hackett et L.L. Methot (2010). Recruitment and selection in Canada (4eédition). Nelson Education.
  • Kelloway, K.E., V.M Catano et A.L. Day (2011). People and work in Canada. Toronto, Ontario : Nelson.

Articles de recherche

  • Chapman, D. et D.I. Zweig (2005) Developing a nomological network for interview structure: Antecedents and consequences of the structured selection interview. Personnel Psychology, volume 58, 673-702.
  • Latham, G.P. et C. Sue-Chan (1999). A meta-analysis of the situational interview: An enumerative review of reasons for its validity. Psychologie canadienne, volume 40, 56-67.

La présente fiche d’information a été rédigée pour la Société canadienne de psychologie par les Drs Thomas O’Neill et Derek Chapman, de l’Université de Calgary, et le Dr Blake Jelley, de l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard. Révisée par le Dr Nicolas Roulin, Université Saint Mary’s.

Révision : juillet 2021

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