Série « La psychologie peut vous aider » : Les lésions médullaires

Qu’est-ce qu’une lésion médullaire?

Le terme « lésion médullaire » désigne une blessure à la colonne vertébrale causée par un trauma (p. ex. un accident de véhicule automobile ou une chute) ou une maladie (p. ex. un cancer). La lésion peut être complète, lorsqu’elle concerne une perte de sensation ou une perte de mobilité en dessous du niveau de la lésion, ou elle peut être incomplète, lorsque sont conservées des sensations et/ou de la mobilité en dessous du niveau de la lésion.

On estime qu’il y a actuellement 85 000 personnes qui vivent avec une lésion médullaire au Canada1. Les personnes atteintes d’une lésion médullaire peuvent présenter une perte ou une modification de leurs sensations ou de leur mobilité, comme présenter une perte ou une modification de leur capacité à contrôler leur respiration, leur fréquence cardiaque, leur pression artérielle, leurs intestins ou leur vessie.

Après que la blessure ou la maladie à l’origine du problème a été stabilisée, des soins interdisciplinaires sont recommandés, étant donné l’étendue des problèmes de santé qui peuvent se développer à la suite de ce type de lésion dévastatrice. L’équipe de réadaptation peut comprendre un physiatre (un médecin qui se spécialise dans la médecine physique et la réadaptation), un physiothérapeute, un ergothérapeute, un travailleur social et un psychologue.

Les objectifs de la réadaptation évoluent selon les divers stades du rétablissement. Les premiers stades du rétablissement sont axés sur la stabilisation de la blessure ou de la maladie, et sur l’amélioration de la fonction musculaire et de l’amplitude de mouvement des articulations (p. ex. par l’étirement musculaire ou la station debout assistée)2. Aux stades plus avancés du rétablissement, l’établissement d’objectifs dépend de chaque individu, mais vise généralement l’autonomie, l’intégrité et la qualité de vie en général.

Comment les psychologues peuvent-ils aider?

Une lésion médullaire peut changer le cours d’une vie. Le rétablissement peut être difficile puisque les individus doivent composer avec des capacités physiques différentes, une nouvelle routine, des relations interpersonnelles en changement et une perception de soi qui pourrait changer. Bien que l’expérience émotionnelle de chaque individu soit différente, le fait d’éprouver des réactions émotionnelles telles que le choc, la colère et le deuil peut être normal.

Environ 20 à 30 % des personnes atteintes d’une lésion médullaire souffriront de dépression ou d’anxiété à un moment ou à un autre de leur rétablissement3 4. En particulier, les femmes qui accouchent après une lésion médullaire, surtout celles qui ont une lésion haute (c.-à-d. une blessure au niveau cervical), sont plus à risque de souffrir de dépression post-partum (25 à 37 %) et d’anxiété (18 à 33 %)5. Le taux de suicide est élevé, selon une étude qui a montré que le taux de mortalité par suicide chez les personnes qui ont une lésion médullaire traumatique est cinq fois plus élevé qu’au sein de la population en général6. Les personnes atteintes d’une lésion médullaire peuvent aussi être plus à risque de développer une dépendance, surtout au cannabis et aux opioïdes7. Les troubles de santé mentale peuvent aggraver les complications physiques associées à la lésion médullaire et compromettre la réadaptation8 9.

De plus, la présence concomitante d’un traumatisme crânien (TCC) peut survenir dans pas moins de 59 % des cas de lésion médullaire10. Les impacts physiques, émotionnels et cognitifs de la lésion médullaire, qui peuvent inclure des troubles de l’attention ou d’apprentissage, de l’agitation et des difficultés à réguler ses émotions, sont difficiles à dissocier des autres complications liées à la lésion médullaire, ce qui peut compliquer davantage le processus de réadaptation11.

Les psychologues jouent un rôle crucial dans la réadaptation des personnes atteintes de lésion médullaire. En tant que praticiens qualifiés en gestion des changements émotionnels et comportementaux, les psychologues peuvent collaborer avec les personnes atteintes d’une lésion médullaire durant et à chaque stade de leur réadaptation. Cela dit, un soutien psychologique précoce est idéal, en particulier lorsqu’un double diagnostic de TCC et de lésion médullaire est suspecté : des recherches longitudinales ont montré une stabilité des stratégies d’adaptation et de la santé mentale depuis la 12e semaine jusqu’à 10 ans11 12.

Des éléments indiquent que les traitements psychologiques sont efficaces pour les personnes atteintes d’une lésion médullaire. Il a été démontré que la thérapie cognitivo-comportementale diminue les symptômes de dépression et d’anxiété et qu’elle améliore les stratégies d’adaptation, avec la même efficacité, qu’elle soit proposée individuellement ou en groupe, en personne ou en ligne13. Il y a moins d’études portant sur la pleine conscience, mais la recherche actuelle a aussi montré des bienfaits sur la douleur et la gestion de l’humeur14. Les programmes d’autogestion peuvent réduire le stress, améliorer le sentiment de contrôle et la capacité d’adaptation, et certaines preuves laissent penser qu’il y aurait des bénéfices à long terme15. Les thérapies familiales et conjugales peuvent aussi aider les personnes atteintes d’une lésion médullaire et leurs proches à traverser les changements survenant dans la dynamique de leurs relations. Dans l’ensemble, les interventions psychologiques viennent compléter les autres traitements en rééducation (p. ex. la médication, les exercices et les chirurgies expérimentales) afin d’améliorer le bien-être des personnes atteintes d’une lésion médullaire.

References

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  2. Nas K, Yazmalar L, Şah V, et coll. Rehabilitation of spinal cord injuries. World J Orthop 2015;6(1):8-16. doi: 10.5312/wjo.v6.i1.8 [publié sur Online First: 20150118]
  3. Williams R, Murray A. Prevalence of depression after spinal cord injury: a meta-analysis. Arch Phys Med Rehabil 2015;96(1):133-40. doi: 10.1016/j.apmr.2014.08.016 [publié sur Online First: 20140916]
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  6. Savic G, DeVivo MJ, Frankel HL, et coll. Suicide and traumatic spinal cord injury-a cohort study. Spinal Cord 2018;56(1):2-6. doi: 10.1038/sc.2017.98 [publié sur Online First: 20170926]
  7. Graupensperger S, Corey JJ, Turrisi RJ, et coll. Individuals with spinal cord injury have greater odds of substance use disorders than non-sci comparisons. Drug Alcohol Depen 2019;205 doi: 10.1016/j.drugalcdep.2019.107608
  8. Elliott TR, Frank RG. Depression following spinal cord injury. Arch Phys Med Rehabil 1996;77(8):816-23. doi: 10.1016/s0003-9993(96)90263-4
  9. Aoki T, Hosaka T, Ishida A. Psychiatric evaluation of physical rehabilitation patients. Gen Hosp Psychiatry 1995;17(6):440-3. doi: 10.1016/0163-8343(95)00060-7
  10. Budisin B, Bradbury CC, Sharma B, et coll. Traumatic Brain Injury in Spinal Cord Injury: Frequency and Risk Factors. J Head Trauma Rehabil 2016;31(4):E33-42. doi: 10.1097/HTR.0000000000000153
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  14. Hearn JH, Finlay KA. Internet-delivered mindfulness for people with depression and chronic pain following spinal cord injury: a randomized, controlled feasibility trial. Spinal Cord 2018;56(8):750-61. doi: 10.1038/s41393-018-0090-2 [publié sur Online First: 20180326]
  15. Kennedy P, Duff J, Evans M, et al. Coping effectiveness training reduces depression and anxiety following traumatic spinal cord injuries. Br J Clin Psychol 2003;42(Pt 1):41-52. doi : 10.1348/014466503762842002

Pour plus d’informations

Vous pouvez consulter un psychologue agréé pour savoir si une intervention psychologique peut vous aider. Les associations provinciales et territoriales de psychologues, et certaines associations municipales de psychologues offrent des services d’aiguillage. Pour connaître les noms et les coordonnées des associations provinciales et territoriales de psychologues, veuillez vous rendre à l’adresse https://cpa.ca/fr/public/unpsychologue/societesprovinciales/ .

La présente fiche d’information a été préparée pour la Société canadienne de psychologie par le Dr Andrei Krassioukov, professeur, division de la médecine physique et de la réadaptation, faculté de médecine, Université de la Colombie-Britannique, président et directeur adjoint, Rehabilitation Research, International collaboration on Repair Discoveries (ICORD), et Anh-Duong (Jennifer) Phan, assistance à la recherche en réadaptation, ICORD.

Date : février 2023

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